TRAVAIL NON COMPTABILISÉ DANS PIB (liste non exhaustive) :
> Travail domestique : ensemble des taches non rémunérées réalisés au sein du foyer pour l’entretenir (≈3h/jour)
Exemples : nettoyage de la maison, cuisine, vaisselle, entretien du linge, rangement, courses
> Travail administratif : sous-catégorie du travail domestique, tâches réalisées dans le but d’organiser et d’assurer le bon fonctionnement du ménage
Exemples : faire la déclaration d’impôts, gérer les factures et les comptes, prendre les rendez-vous, planifier le budget, s’occuper du courrier et des papiers
> Travail du care : travail de soin à autrui, considéré comme relevant de compétences féminines “innées” ne demandant pas d’effort (“vocation”)
Exemples : proches aidants (de parents vieillissants, du conjoint malade ou en situation de handicap), soin aux enfants, animaux, collègues
> Travail reproductif, affectif et sexuel : activités liées à la reproduction et au travail du care
Exemples : procréer, donner de l’affection à saon conjoint·e, élever les enfants
> Travail mental : il s’agit de la charge mentale (≠ mental du sportif) : travail d’organisation, de planification pour satisfaire les besoins de chacun·e et le bon fonctionnement des lieux, des activités, des services
Exemples : gérer les emplois du temps des enfants (école, loisirs), voire du/de la conjoint·e, prendre les rendez-vous chez le médecin, planifier les repas, regarder s’il reste de la lessive
> Travail émotionnel : les émotions ne sont pas en dehors de règles sociales et elles nécessitent une certaine gestion
Exemples : calmer une personne violente, écouter l’autre, l’aider à définir son émotion, lire une situation via les émotions
> Travail de la conversation : la conversation n’est pas spontanée mais nécessite certaines conditions et des efforts de la part des participant·es
Exemples : les femmes, moins bavardes que les hommes, posent plus de questions et valorisent plus l’autre dans l’échange
> Travail au sein de l’entreprise du/de la conjoint·e : travail non rémunéré réalisé au sein de l’entreprise ou de l’exploitation du/de la conjoint·e sans avoir de statut précis
Exemples : travail au sein de l’exploitation agricole de saon conjoint·e, enfant aidant dans le commerce de ses parents, secrétariat
TRAVAIL COMPTABILISÉ DANS PIB (liste non exhaustive) :
> Travail du care : travail de soin à autrui, considéré comme relevant de compétences féminines “innées” ne demandant pas d’effort (“vocation”)
Exemples : auxiliaires de vie, aides à domicile, aides soignant·es, infirmier·es , caissier·es, livreur·ses
> Travail de nettoyage : sous-catégorie du travail du care, travail consistant à rendre le pays propre afin qu’il puisse fonctionner
Exemples : femmes de ménage (bureaux, immeubles, industries...), éboueurs, laveurs de vitres
> Travail administratif : tâches consistant à assurer le bon fonctionnement d’une entité
Exemples : secrétaires, chargé·es d’accueil, assistant·es, agent·es administratif
> Travail du sexe : travail consistant à effectuer une prestation sexuelle en échange d’argent
Exemples : prostitution, camgirls/boys, acteurices porno, accompagnant·es sexuel·les
Compte tenu du fait que les études, recherches et statistiques sont effectuées suivant une division binaire des êtres humain·es entre “ hommes ” et “ femmes ”, nous serons parfois contraint·es d’utiliser ces mêmes deux catégories dans ce texte.
Le travail visible, c’est le travail que vous rêviez de faire, enfant. Astronaute, médecin, pilote d’avion, star de cinéma, scientifique, pompier… ce sont les métiers auxquels les enfants jouent, les uniformes avec lesquels iels se déguisent pour imiter les grand·es… enfin… avec lesquels les petits garçons se déguisent. Parce que les petites filles, elles, sont revêtues de costumes d’infirmière ou de cuisinière et jouent à la poupée, à la caissière ou à passer la serpillère…C’est ça, le travail invisible. C’est le travail effectué sans rémunération ou sous-payé (i.e. moins payé que sa valeur, quoi que cela signifie), n’engendrant aucune reconnaissance sociale, altérant le sentiment de dignité des travailleureuses, réalisé dans des conditions bien souvent déplorables et dont pourtant l’économie du capitalisme tire énormément profit (cf. liste ci-avant).
Et nous, les colleureuses de Besançon, ce travail invisible nous intéresse. Parce qu’il s’agit d’un enjeu de lutte féministe, à la fois de genre, de classe et de race sociale : le travail invisible concerne principalement les personnes non hommes, non cisgenres, non aisées, non blanches voire sans papiers. C’est-à-dire les enfants (e.g.TDS, aide aux parents), femmes, personnes venant des départements des Outre-mer en métropole, personnes racisées, personnes migrant·es, personnes sans-papiers, etc.
Situé·es en France, et de nos jours, nous affirmons que le travail invisible compte. Il a de la valeur.
- Déjà de par son indispensabilité : les personnes qui le réalisent nettoient le monde des Blancs/riches, prennent soin d’eux physiquement et mentalement, les soignent et les nourrissent, s’occupent de leurs enfants, de leurs animaux et de leurs papiers. Sans ces personnes invisibilisées, que l’on ne veut pas voir, le monde des Blancs/des riches/du Nord s’effondre. Ce travail est indispensable, et ne devrait en aucun cas être considéré comme indigne ou ingrat.
- Également de par le profit économique que réalisent les Blancs/riches grâce à ce travail invisible (à titre indicatif, le travail domestique est évalué à lui seul à 33% du PIB, 64% de ce travail étant effectué par les femmes).
Si ce travail n’est pas visible, alors les personnes qui le réalisent n’existent pas vraiment. Le travail est effectué comme par magie, la machine à laver se lance toute seule, les bureaux des grandes entreprises sales le soir reluisent le lendemain matin grâce à la petite fée de la nuit, les nourrissons se lavent, mangent et s’habillent seul·es comme des grand·es.
Les conséquences de l’invisibilité, voire de l’invisibilisation volontaire, de ce travail, sont extrêmement nombreuses : précarité, temps partiel contraint, fatigue, épuisement mental et physique, supporter la pression, les injonctions multiples et contradictoires et l’emprise, double journée, moindre retraite, pas ou peu de temps, de loisirs (e.g. sport) et d’épanouissement personnel, se heurter au plafond de verre, exclusion de certains espaces privés, publics, professionnels et politiques, troubles psychologiques et/ou psychiatriques, isolement, culpabilité et culpabilisation, complexité des démarches administratives, responsabilités accrues (e.g. éducation des enfants), problèmes de santé mentale et physique (e.g. maladies musculo-squelettiques), stress, dépression post-partum, concurrence entre personnes invisibilisées dépression, burn-out, suicide… liste loin d’être exhaustive.
Alors, que fait-on ? Selon notre idéal de féministes anticapitalistes, la solution serait l’abolition du travail. Tout simplement.
Maintenant, d’une manière un tout petit peu plus pragmatique, on pourrait imaginer que l’État mette en place un certain nombre de réformes permettant de sortir de l’ombre ce travail invisible. De le remettre au centre. Et ceci en le rendant visible, en le reconnaissant et en le valorisant (salaires, discours)… pas seulement en situation de crise sanitaire – lorsque l’invisible devient, par la force des choses, visible, et qu’on ne peut plus le cacher ni l’ignorer – mais partout, tout le temps. Voire en instaurant un revenu universel ?
Bon, cela ne semble pas non plus en bonne voie. Alors à notre échelle, collective comme individuelle, on peut faire bouger les choses dans nos vies : on peut reconnaître l’interdépendance entre travail visible et invisible et l’importance de ce dernier, décorréler l’affectif du travail invisible (je t’aime mais je ne vais pas ramasser tes miettes), s’organiser, imaginer des stratégies concrètes pour être davantage équitables, et s’éduquer mutuellement pour créer un monde où tout n’est pas parfait, mais où le travail invisible n’est plus.
Nous avons donc choisi d’afficher ce slogan le 1er mai, lors de la manifestation pour les droits des travailleureuses. Les problèmes soulevés lors de cet évènement concernent le travail visible, et sont légitimes. Cependant, cette légitimité n’empêche pas que l’on oublie trop systématiquement de parler aussi du travail invisible. L’afficher sur les murs de notre ville, c’est donc pour nous un moyen de le faire apparaître.
Des colleureuses de Besançon
RESSOURCES
Livres :
Un autre regard, Emma
Une voix différente. Pour une éthique du care, Carol Gilligan
Bullshit jobs, David Graeber
Travail invisible, portrait d’une lutte féministe inachevée, Camille Robert & Louise Toupin
Un féminisme décolonial, Françoise Vergès
Brochure :
La répartition des tâches entre les femmes et les hommes dans le travail de la conversation, Corinne Monnet
Podcasts :
Un podcast à soi : qui gardera les enfants
Un podcast à soi : Angelina
Les couilles sur la table : à la recherche des nouveaux pères
Les couilles sur la table : des chaussettes et des hommes
Pages web :
Référentiel de psychiatrie et d’addictologie collection « l’officiel ECN » : http://www.asso-aesp.fr/wp-content/uploads/2014/11/ECN-psy-addicto-AESP.pdf
Fiche travail invisible, Association Féministe D’Éducation Et D’Action Sociale (Afeas) :
https://www.travailinvisible.ca/wp-content/uploads/2021/04/0_Fiches_infos_5ensemble.pdf
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