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Avis défavorable sur l’enquête publique du projet de parc photovoltaïque sur forêts anciennes à Loulle / Mont-Sur-Monnet (39)

Jura

Après 30 jours d’enquête publique qui aura confirmé tous les avis défavorable précédents, la balle est à nouveau dans le camp du Préfet, qui devra trancher sur ces permis d’ici à début janvier...

Alors que les projets mal ficelés se succèdent depuis les promesses de baux signées en 2020 par les 2 communes et quelques propriétaires forestiers, Energies du plateau de Balerne, filiale de Cevennes Energy, a déposé au printemps ses demandes de permis de construire et d’autorisation de défrichement pour un parc photovoltaïque de 51 ha (en plusieurs "îlots") entre lapiaz, forêts anciennes et résurgences.

Une enquête publique sur un dossier bancal

À l’été, le dossier était déjà connu des autorités : la DDT (au titre de la loi sur l’eau), la CDPENAF, la MRAE et l’ONF avaient déjà rendu des avis très défavorables, revenant à chaque fois sur l’injustifiable choix d’artificialiser une forêt que certains ne jugent pas assez productive. Elle est pourtant parfaitement adaptée à son milieu et bien plus riche et importante que ce que ne le laisse penser le bureau d’études environnementales complice qui l’a à peine parcourue. Le Préfet avait donc à sa disposition tous les éléments pour ne pas ouvrir d’enquête publique (ce qui relève de son pouvoir discrétionnaire), mais a décidé de demander un 5e avis. Des fois que...

Quelques documents à analyser en 30 jours

Cette enquête publique composée de 1793 pages de dossier, s’est tenue sur seulement 30 jours, le délai minimal légal. Elle a proposé 14 demi-journées de permanences, mais aucune réunion publique. L’enjeu pour l’État est ainsi de purger le dossier de ses principales faiblesses et disqualifier l’opposition si elle n’y participe pas. La multiplication de ces projets nécessite une critique du modèle énergétique, fossile et fissile, productiviste et capitaliste qui les engendre, pour nourrir un débat public local sur le fond. Mais le dispositif de l’enquête publique, qui vise à rendre publiquement acceptable ces projets, a réduit les opposant⋅e⋅s à pointer l’absence de prise en compte de tel reptile dans l’étude environnementale, à examiner la légalité de tel engagement extorqué aux conseils municipaux, à dénoncer l’impact du choix de tel système d’ancrage... En veillant à ne pas cautionner cette mascarade dépolitisante, le Collectif Citoyens et Résistants de Champagnole s’y est collé, en réalisant affiches et tracts pour informer la population locale qui aurait raté l’affichage réglementaire, en faisant revivre le rôle de crieur de marché ou de village. Certain⋅es d’entre nous ont aussi participé aux permanences et ont pu échanger avec les commissaires-enquêteurs, et ont ainsi entendu de leur part des commentaires loin de la neutralité qui s’imposait à eux sur ce projet.

De la publicité pour l’enquête publique !

Les membres du collectif ont passé des centaines d’heures à éplucher le dossier, à comparer les versions de projets qui s’y superposent, à noter des moyens pour d’éventuels recours juridiques, à formuler leurs observations, à inciter d’autres personnes à prendre la plume ou à préparer les mobilisations suivantes. Notre revendication de réunion publique pour présenter le projet dans sa dernière version a été balayée du revers de la main par les communes et le promoteur, qui ont jugé que ce projet ayant fortement évolué en 4 ans ne méritait pas d’être à nouveau présenté aux habitant⋅e⋅s.

Nous avons pu découvrir dans le dossier bien des angles morts. Sur certains sujets, Cevennes Energy manipule les données (son étude carbone montre bien que ce projet aurait émis une électricité 8 fois plus carbonée que la moyenne de celle du réseau français, mais le promoteur utilise un indicateur bidon pour en extraire le résultat inverse). Sur d’autres, Cévennes Energy propose tout et n’importe quoi : d’abord, des fixations sur pieux, puis sur gabions, et quand plusieurs contributions ont pointé la nécessité d’un terrain plat, dessouché et de transports incessants pour ce mode d’ancrage, le promoteur est revenu à ses amours premières, tant pis pour le greenwashing : quoi de moins cher que des fondations coulées en béton ? L’amateurisme de cette filière et le crédit qui lui est accordé sont proprement terrifiants.

Un avis défavorable, mais un rapport qui dit tout et son contraire...

La commission d’enquête a reçu 302 contributions, dont 244 défavorables selon son décompte. Son rapport, qui pratique le grand écart permanent entre copier-coller du promoteur et questionnements candides, se termine sur ces conclusions :

Positivement :
Le projet prévoit une importante production d’électricité décarbonée.
Il diminue les émissions de CO2 ;
Il apporte des retombées financières à l’ensemble des collectivités et aux entreprises locales.
Il respecte la biodiversité.
Il apporte la possibilité d’une garantie financière.

Négativement :
La population n’a pas été préalablement bien informée.
Les communes ne bénéficient pas d’une retombée financière suffisante.
Il n’y a pas eu d’étude sérieuse sur l’eau dans le contexte karstique.
Le défrichement et l’entretien des zones défrichées posent problème.
Le bétonage des supports de panneaux et les piquets de fixation des clôtures
Le fractionnement du parc bouleverse le contexte local dans la forêt.
Le fractionnement du parc entraine la création de 2.500m de chemins.
Le fractionnement du parc entraine l’enfouissement des cables sur 2.400m.
Les travaux vont durer 2 ans
Risque possible d’incendie lors des épisodes de canicule
Inadéquation avec la loi APER ;
Inadéquation avec le SRCE.
Avis défavorable de : ONF, DREAL, SEREF, CDPENAF.
Avis dévavorable majoritaire des observations du Public.

Si la partie "positivement" montre que la Commission d’enquête n’a pas été en mesure de faire une lecture critique du dossier ou même de lire les contributions qui démontent chacune de ces contre-verités, la partie "négativement" ressemble à une compilation de tous nos tracts et communiqués depuis 4 ans. Tout ça pour ça...

Restons mobilisé⋅e⋅s !

La logique voudrait que le Préfet se serve enfin de cet avis défavorable (qui n’est que consultatif) pour refuser les permis de construire et l’autorisation de défrichement. La logique voudrait que ce projet soit abandonné par son promoteur et enterré par les communes car rien ne justifie qu’on sacrifie une forêt ancienne et riche, ainsi que nos sols et notre eau pour produire une énergie plus carbonée que celle du réseau. Méfions-nous cependant de ce que la logique voudrait, puisque ces derniers mois elle a été bafouée à de multiples reprises par toutes les autorités politiques de notre pays.

Nous avons, par notre mobilisation, par le recours aux outils d’expressions locaux, par nos argumentaires, arraché cet avis défavorable, à une commission d’enquête dont le rôle est d’épuiser et de marginaliser les oppositions pour faire passer le maximum de projets d’un autre temps, au profit de la sacro-sainte croissance et du capital. Mais cette victoire d’étape est le revers de la médaille de toutes nos défaites collectives, de tous ces projets qui passent tout droit à travers cette étape (parcs solaires de Pimorin ou de Cressia tout récemment). Ces projets n’ont pas les mêmes impacts forestiers, portent sur des espaces moins gigantesques, mais ils n’en sont pas plus acceptables. Si leur avis d’enquête publique est favorable, c’est parce que nous n’avons pas pu y mettre le même rapport de force, parce qu’ils arrivent trop vite sur un territoire avec trop peu de réseaux militants. Partout en France, chaque jour, des nouveaux projets émergent, plus vite que les collectifs pour s’y opposer.

Une petite apparition lors de l’anniversaire du SIDEC qui accueillait la SEM ENR (que Cévennes Energy aimerait faire rentrer au capital du parc) à Lons-Le-Saunier, l’occasion de passer le message à de nombreux élus locaux

Ces projets ne sont ni démocratiquements décidés, ni concertés, ni consentis localement. En l’absence de politique de sobriété energétique, ces projets sont totalement inadaptés aux changements globaux actuels. En ce moment même, l’État se prépare à adopter par décret la troisième stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et la troisième programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), sans qu’aucun débat démocratique n’ait eu lieu, après 1 an et demi de retard sur cette échéance. Notre droit à un environnement vivable est bafoué, l’État faillit à sa mission de préservation de nos capacités de vie. Notre opposition est légitime et nous ne pouvons faire confiance qu’à nous même pour nous réapprorier la réflexion sur nos besoins énergétiques et les moyens de les satisfaire, à tous les niveaux !

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