« Réarmement démographique » : entre une moue d’autocongratulations et un rictus méprisant, Macron lâche la formule. Traduisons simplement : fRrrançais, fRrrançaises, donnez des enfants à la patrie, à son économie et son armée. Car la guerre approche. Elle est en Ukraine, aux portes de l’Europe, dit-il
solennellement d’une voix qui a poussé son premier cri avant la honte. Le président, dont les médias aiment rappeler la jeunesse, apprécie déterrer les vieux débats : il est de ceux qu’on appelle les réactionnaires.
Au sortir de la première guerre mondiale, les nationalistes s’attellent déjà à préparer la prochaine boucherie. Après l’hécatombe de 14-18, il faut faire le stocks d’armes mais également de soldats. Les usines d’armement et le ventre des femmes sont alors au centre des préoccupations politiciennes, avec la productivité comme mot d’ordre. Pondre un maximum de petits gars qui porteront un maximum de fusils. Le programme est simple et il profite toujours aux mêmes. Mais voilà que pointe le nez des fauteur·ses de troubles, anarchistes et autres traîtres à la nation. On parle, dans les pic-niques végétariens, de paix entre les peuples et de guerre entre les classes, mais également de sexualité, de contraception et d’avortement. Qui plus est avec un accent allemand, « la langue de l’ennemi » ! Médecin anarchiste autrichien poursuivi pour la pratique de vasectomies clandestines, Norbert Bartosek quitte les ruelles viennoises et trouve
refuge dans la région bordelaise. Bien décidé cependant à ne pas ranger le bistouri de si tôt, il continue d’opérer les ouvriers et militants libertaires au grand dam des autorités natalistes. Avec l’aide d’Andrée
et André Prévotel, il transforme la table à manger du couple en table d’opération improvisée. Dénoncée par la police, l’association de malfaiteur·ses est conduite devant le tribunal puis derrière les barreaux, coupable de « coups et blessures » et de « mutilation sans nécessité et dans un but immoral ». Dans le contexte de « réarmement démographique » de l’entre-deux guerres, se contracepter ou avorter est une atteinte au corps même de la nation.
Les gilets jaunes déjà voyaient rouge en entendant les petites phrases de Macron qui contiennent à elles seules énormément de choses : un passé et une certaine conception du futur (qui ressemble étrangement au passé). Nos dirigeants ne sont pas stupides, ils connaissent l’histoire et les vermines qui la peuplent. Ils essayent même parfois de les réhabiliter, comme c’est le cas pour Macron avec le Maréchal Pétain, ce « grand soldat » de 14-18, accessoirement chef collaborationniste de l’État français et organisateur de la rafle du Vel d’hiv qui a livré en 1942 plus de 13 000 juifs et juives aux nazis. Pour cette crapule fasciste (le maréchal Pétain), les responsables de la défaite sont toutes trouvées. Les femmes ont manqué à leur devoir de faire naître des rangées de petits patriotes, naissant la main sur le cœur et contemplant déjà au sortir des entrailles de leur mères le lever du drapeau tricolore.
En 2024, Macron fantasme ce même lever du drapeau avec comme spectatrice une jeunesse nombreuse et bien blanche, en uniforme et enrégimentée au sein du Service National Universel. Parce qu’entendons-nous bien : si le président entend repeupler le pays, ce n’est pas en ouvrant ses frontières ni en régularisant les sans-papiers. L’injonction au « réarmement démographique » arrive en même temps que le projet de
« loi immigration ». Entendez-y ce que vous y voulez, nous voyons là une adhésion à peine voilée aux théories zemmouriennes du « grand remplacement ». Nous y entendons les ultimes râles d’un monde
capitaliste, raciste et sexiste à l’agonie. Un monde qui nous sert éternellement sa gamelle de dominations et d’exploitation, de guerres et de nationalismes, laissant sur nos palets un goût amer et un violent désir de tout changer.
Ni uniforme, ni contrôle de fertilité ! Nos corps et nos vies n’appartiendront jamais à la patrie !
Des Cerises Remontées
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